ACTUS
C’EST OUF / REPORTAGE
NEW-YORK CITY - SUR LES TRACES DE WILLIAM KLEIN
JE ME RETROUVE À NEW-YORK POUR 72 HEURES
7 mai 2009, ma sœur allait fêter ses 40 ans dans quelques jours à New York et il ne m’était même pas venu à l’esprit de m’y rendre. Je m’étais exclu de ce moment de fête sans même m’en rendre compte ou plutôt je ne m’autorisais pas à en être. Ce n’était pas pour moi. Deux jours avant je n’avais pas de passeport valide, puis tout a basculé quand j’ai réalisé, presque trop tard, que ma place était là-bas à côté de ma sœur, aux côtés de mes parents.
Dans l’avion j’écris à ma petite sœur les raisons de ma venue sur les quatre côtés d’une enveloppe déchirée et dépliée d’American Airline. Quelque chose comme un je t’aime fraternel posé sur le seul papier à ma disposition, cette enveloppe qui a terminé saturée d’une écriture toute compressée par manque de place ou de temps pour tout dire.
Puis New York City m’accueille avec son odeur, ses bruits, son agitation, ses lumières tranchées, son gigantisme.
Je me laisse prendre sans aucune résistance, tombant dans cet état particulier provoqué par le décalage horaire, avant de glisser dans le sentiment d’invulnérabilité que procurent des journées qui commencent très tôt et qui ne s’achèvent jamais. Dans trois jours c’est déjà Paris.
Moi qui me heurte régulièrement à des réactions similaires à celle de cette galeriste de renom qui se sent incapable de me vendre, pour la première fois j’entrais parfaitement dans une case, celle du questionnement de la 12e édition de ce festival : “Qui est photographe ?”
Tout va très vite, surprise, rires, larmes de joie, étonnement, embrassades, larmes d’émotion, cadeau, don du petit mot sur l’enveloppe reconfectionnée en lettre, larmes de bonheur…
Le lendemain vers 5h du matin j’arpente seul la ville, caméra et appareil photo au point, tout en réalisant ce que j’ai l’habitude de produire.
Sans savoir que d’autres images m’ont donné rendez-vous ici pour m’emmener vers d’autres projets qui me tiendront excité pour les mois, peut-être les années à venir.
Pour l’instant c’est avec les photos de rues que je fricote. Jamais assez proche, jamais assez longtemps, jamais assez fortes, jamais assez patient. Je l’ai tellement entendu écrit par mes maîtres à attraper de l’image que je me demande pourquoi je me débats tant à vouloir croiser au coin d’une rue une photo de William Klein façon NY 1954-55 ou dans le pur jus des photos quotidiennes réalisées par Raymond Depardon pour Libération (juillet 1981).
Pour quoi faire ? Encore des personnages qui marchent, l’obsession de ces visages qui viennent à moi, la volonté d’attraper leurs regards, de fixer l’expression de ces inconnus que je vais apprendre à connaître sur papier photo. Comme si je ne pouvais pas faire autrement. Comme si j’avais encore besoin de ces mêmes images que j’ai déjà tant cherchées, tant ratées et parfois trouvées…
extrait de l’article publié le 09/18/2016 sur www.fredblanc.com